Dans notre société du spectacle, les guerres, les castrophes naturelles, les famines sont des moyens d'aviver notre compassion par médias interposés; mais leur relation objective et contextualisée n'est pas vendeuse : lorsque des enfants sont brûlés par un bombardement, il nous faut une petite fille nue sur une route, lorsqu'un volcan entre en éruption, il nous faut une petite fille qui agonise prisonnière de la boue, lorsque la famine touche le soudan, il nous faut une petite fille à à bout de forces sous le regard d'un vautour. Lorsque des réfugiés meurent par milliers en Méditerranée, il nous faut le corps d' un petit enfant noyé, transformé en pantin de son sur une plage.
Lorsqu'il devient de plus en plus évident que nous commençons à subir un réchauffement climatique problématique pour notre survie il nous faut une adolescente atteinte de la maladie d' Asperger pour personnifier la réelle inquiétude de nos enfants sur la planète qu'ils nous ont confiée, par ses prises de parole beaucoup plus relayées par les médias que les travaux de tous les scientifiques
Il nous faut une information non plus objective et contextualisée mais personnifiée, qui ne fasse pas appel à notre raison mais à nos sentiments.
Photo de Nick Ut
Devant nous au fond les nuages noirs du napalm
Sur la route au premier plan à gauche un petit garçon qui sanglote
Au second plan une petite fille nue les bras écartés avec d'autres enfants
À droite un photographe qui recharge son appareil derrière des soldats
Photo de David Burnett
Devant nous un peu plus tard au premier plan de dos un petit garçon court
Avec la petite fille nue un soldat et d'autres enfants qui sont devant lui
De face des soldats échelonnés sur la route au fond un groupe de villageois qui attend
Au loin derrière nous les nuages noirs du napalm
Photo de Frank Fournier
Au centre une petite fille prisonnière de la boue
Autour dans un premier cercle la foule des sauveteurs impuissants
Au loin derrière le volcan Nevado del Ruiz
Encore plus loin dans un deuxième cercle nous tous dans le monde aussi impuissants
Dans cette foule un cameraman prend une video pour la télévision espagnole
Dans cette foule un photographe français prend des clichés
Dans cette foule trop loin la grue et la pompe pour la sauver
Dans cette foule dans le monde nous face à cette petite fille qui meurt
Photo de Kevin Carter
Au premier plan de dos une petite fille accroupie hanneton agrippé au sol aride
Au second plan de face un homme à droite du chemin la prend en photo
Que dire d'une espèce qui laisse mourir ses enfants et récompense le photographe
Le vautour répond d'un haussement d'aile et s'envole
Cette photo avec au premier plan une petite fille au bout de ses forces
Et en arrière plan ce vautour pensif au Soudan
Kevin Carter tu ne l'as prise ni seul ni librement
C'est nous tous qui t'avons contraint de la prendre et l'avons prise avec toi
Et tu n' es pas un charognard de la compassion
Post scriptum
A la suite d' une enquête de plusieurs jours au sud du Soudan
Alberto Rojas un photojournaliste du quotidien "El Mundo",
A retrouvé le père de l'enfant en fait un petit garçon
Dans un hameau près d'Ayod au sud Soudan
Où à l'époque la famine faisait rage du fait de la guerre civile
Entre le nord musulman et le sud chrétien et animiste
Le père de Kong Nyong nom de l' enfant
Confirme que sa tante se trouvait à quelques mètres de lui
(Sa mère était morte en couches)
Qu'elle faisait bien la queue pour obtenir la ration alimentaire
Que les volontaires de Médecins du monde distribuaient aux enfants du village
Que son fils avait survécu à la famine
Mais était décédé quatorze ans plus tard de fièvres paludéennes:
En suivant le lien ci-dessous vous pouvez parcourir l' exposition de photos organisée par médecins du monde 34 vues contre l' oubli :
http://www.medecinsdumonde.org/rep_reportages/chambre_noire/remerciement_fr.swf
Photo de Nilufer Demir
Au premier plan à droite de dos un gendarme
Presque sur le même plan au centre le corps d' un enfant en short bleu et tee shirt rouge
La tête en partie tournée vers nous léchée par une vague
Reposant sur le sable d' une plage de Bodrum en Turquie il est 6 heures du matin
Les photographiant Nilufer Demir journaliste Turque pensant
There was nothing left to do for him
Il n' y a plus rien à faire pour lui
There was nothing left to bring him back to life
Il n' y a plus rien à faire pour le ramener à la vie
There was nothing to do except take his photograph and that is exactly what I did
La seule chose que je peux faire sur le moment c’est mon métier
Qui a eu le temps de prendre des photos de Aylan avant l' arrivée du gendarme
Qui prendra un peu plus tard des photos du frère d' Aylan
Se disant la seule chose que je peux faire sur le moment c' est mon métier
De Galip qui gît comme Aylan sur cette plage de Ali Hoca Burnu à une centaine de mêtres
Tandis que leur mère gît sur une autre plage 150 miles plus loin
Pour le moment beaucoup plus loin nous tous qui faisons
Comme si la Méditerranée n'est pas un cimetière de dizaines de milliers de réfugiés
Nous ignorons la mort de Aylan de son frère Galip et de leur mère Rehen
Et le souhait de Mehmet Ciplak qui s' approche du petit corps d' Aylan
Mon Dieu, pourvu qu'il soit toujours en vie
Tandis que tout proche à l' arrière-plan en haut à droite sur une autre photo
Deux pêcheurs Turcs à quelques dizaines de mètres sont en train de pêcher à la ligne
Tranquillement comme nous
Photo de Nilufer Demir
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Paroles de Greta Thunberg devant l' assemblée nationale française :
https://twitter.com/i/status/1153617012356046848
Depuis que j'ai commencé à vous parler, le monde vient d'émettre près de 800.000 tonnes de CO2
420 gigatonnes de CO2, c’est tout ce qu’il nous restait, au 1er janvier 2018, à émettre pour avoir 67 % de chances d’atteindre l’objectif d’1,5 °C d’augmentation de la température mondiale
La bonne nouvelle est que le monde ne va pas s’arrêter d’ici 11 ans
La mauvaise est que« si nous ne faisons rien d’ici 2030, nous aurons passé plusieurs points de bascule et nous ne pourrons plus revenir en arrière .
Des personnes ne sont pas d’accord, disent que nous, les enfants, sommes des alarmistes. Je les invite à lire le rapport du Giec, page 108. On y trouve le budget carbone.
Nos émissions s’élèvent à environ 42 gigatonnes chaque année. Ce budget qui nous reste sera complètement épuisé d’ici 8 ans et demi et ces chiffres sont incontestables. Pas une seule fois ai-je entendu un journaliste ou un politique exprimer ces chiffres. Comme s’ils n’existaient pas.
Nous devenons les affreux qui avons ces choses à dire car personne d’autre n’ose le dire ou veut le dire. Et parce que nous citons ces chiffres, nous sommes l’objet de haine et de menaces
Je suis convaincue que le plus grand danger ce n’est pas le fait d’être inactif.
Le plus gros danger c’est lorsque les entreprises, les politiques, font semblant d’agir alors que rien n’est fait, sauf de belles campagnes de communication
C’est presque comme si vous ne saviez pas que (ces chiffres) existent,
comme si vous n’aviez pas lu le dernier rapport du Giec dont dépend l’avenir de notre civilisation
Ou peut-être simplement que vous n’êtes pas assez matures pour dire les choses telles qu’elles sont.
Même cette charge, vous nous la laissez à nous, les enfants
De dire les choses telles qu'elles sont
Dire les choses telles qu'elles sont
Telles qu'elles sont
https://twitter.com/i/status/1153617012356046848