La fameuse deuxième controverse de Valladolid
Les animaux domestiques en avaient assez des conditions de vie
A eux faites par ces êtres marchants plus que pensants, les hommes
Et ne cessaient de protester contre ces sus-dites conditions
Voici un exposé non exhaustif de leur état d'âme et propos
Et de la controverse qui s'en suivit avec les animaux sauvages
En la ville de Valladolid
Mais commençons par le commencement si possible
Et d'abord, n'y voyez une quelconque préséance ou préférence,
Par le cheval la plus belle conquête des êtres marchants selon leurs propres dires
Que nous pouvons découvrir hennissant de satisfaction
Devant la disparition des boucheries chevalines
Dans lesquelles lui et ses congénères finissaient équarris sanguinolents suspendus par les pattes
Avant d'être débités en bavette macreuse côte entrecôte ou autre morceaux savoureux
Pour continuer par le bœuf ruminant son désespoir
De ne pas se résoudre à une grève de la faim
Pour n'avoir que la peau sur les os
Et ne plus servir de steak haché dans le premier fast food du coin de la rue
Puis le cochon ayant perdu sa fierté d' entendre proclamer partout
Que tout est bon en lui
Et de se voir transformé en saucisson en jambon en boudin
Sans parler de ses pieds accommodés à la vinaigrette et de sa panse farcie
Puis le mouton bêlant sa rage oui sa rage nous n'exagérons point
Non seulement d' être dévoré par les loups
Mais aussi par les hommes des côtes jusqu'au gigot
Puis l'oie pestant contre ce Dieu incapable d' empêcher ses créatures
Ces êtres marchants plus que pensants de la gaver pour se délecter de son foie gras
Puis le canard cancanant qu'il en avait assez de finir confit dans l'assiette des sus-dits
Puis le pigeon caracoulant sa volonté justement de ne plus en être un
Puis le dindon glougloutant ses protestations afin ne plus être le dindon de cette fameuse farce
Puis la vache beuglant son refus de donner son fameux coup de pied
Pour renvoyer la balle et que l'on continue à lui casser du sucre sur le dos
Puis le chien clabaudant et jurant de ne plus aboyer au passage de la caravane
Pourvu que les adeptes de Confucius ne se régalassent plus de lui
Puis la grenouille coassant qu'elle n'était plus certaine d'être aussi fière
Que ses cuisses fussent appréciées au point d'être considérées comme
Mets savoureux par ces êtres marchants plus que pensants de Français, que leur engeance soit maudite!
Puis l'escargot bredouillant en ne pensant plus qu'à fuir ce beau pays
Où après un jeûne de plusieurs jours pour le faire dégorger
Il est lavé à grande eau ébouillanté et accommodé
Selon mille recettes dont peu lui importait qu'elles fussent savoureuses
Par cette même engeance maudite ces susdits d'êtres marchants plus que pensants de Français
Puis le veau mugissant
Qu'il aimerait bien que les hommes s'en tinssent à leur proverbe
«D'un veau on espère un boeuf et d'une poule un oeuf»
Ce qui lui éviterait de se retrouver dans leurs assiettes découpé en escalope
Baignant dans une sauce au Madère
Puis le chapon coquelinant qu'il accepterait encore d'être eunuque pour devenir vizir
Mais pas pour remplacer la dinde comme mets principal à la fête de Noël
Puis, mais finissons cette énumération
Car j'entends les récriminations de nos académiciens de notre académie
Devant cette suite ininterrompue de «puis» sans fin
Par la poule que nous apercevons coucassant
Contre les propos de ce roi pour qui Paris valait bien une messe
Et qui proclama une fois devenu roi grâce à sa conversion pas très catholique
Hélas hélas hélas trois fois hélas pour notre gallicane poule
«Je ne veux qu'il n'y ait si pauvre paysan en mon royaume
Qu'il n'ait tous les dimanches sa poule au pot»
Ces récriminations et protestations parvinrent aux oreilles des animaux sauvages
Qui convoquèrent les animaux domestiques en la bonne ville de Valladolid
Célèbre pour la controverse qui opposa entre autres Las Casas à Sepulveda
Et qui aboutit à la généralisatioon de la traite des noirs en Amérique
Puisqu'il ne pouvait plus être question de faire des indiens des esclaves
Etant prouvé qu'ils étaient des créatures de Dieu au contraire de leurs noirâtres semblables
Les animaux sauvages leur tinrent à peu près ces propos :
«Qu'avez-vous gagné à accepter votre domestication
Sinon de passer de viande crue pour les animaux carnivores vos frères
À viande cuite pour les hommes»
Propos qui provoquèrent l'indignation des animaux domestiques et cette réplique :
«Si nous n'y avons rien gagné nous n'y avons rien perdu
N'est-ce pas messieurs les tigres les lions les loups les hyènes»
«Vous y avez perdu une chose irremplaçable la liberté» remarquèrent les susdits interpellés
«Belle liberté que celle d'être constamment sur le qui-vive», firent les animaux domestiques
A quoi le gnou ajouta: «Je confirme, la liberté est dure à porter quand on n'est que nourriture aux yeux des plus forts»
«Quant à votre liberté, ll semble qu'elle ne cesse de se restreindre au point que si les zoos n'existaient pas plusieurs d'entre vous auraient disparu de cette planète», ajoutèrent les animaux domestiques
«Je confirme, notre habitat ne cesse de se rétrécir, il n'est plus que mouchoir de poche», approuva notre gnou
Les animaux sauvages s'écrièrent : «Nous n'avons pas dit notre dernier mot»
Ils s'attirèrent de la part des animaux domestiques cette fine remarque : « Ce n'est pas aux singes que vous allez apprendre à faire la grimace»
le gnou dit alors : « Je confirme, les hommes ne ménagent ni chèvre ni chou ni arbre ni bête et n'ont pas pour habitude de mettre de l'eau dans leur vin»
Les animaux sauvages s'adressèrent au gnou : «Ne sois pas de mauvais poil ne viens pas mettre la zizanie entre nous, gnou»
«Vous allez être les dindons de la farce zizanie ou pas», pronostiquèrent les animaux domestiques
«Rassurez-vous nous ne finirons pas en jus de boudin», dirent les animaux sauvages
«Il n'est pire sourd que celui qui ne veut pas entendre», proclamèrent les animaux domestiques
«Nous saurons prendre le taureau par les cornes croyez le bien», ajoutèrent les animaux sauvages
«Olé», interjetèrent les animaux domestiques
Sorti de sa rumination le taureau demanda : «On m'appelle».
Le gnou lui dit : «Nous avons besoin de votre témoignage sur les hommes»
Le taureau répondit : «Cela fait belle lurette que nous affrontons ces chétifs êtres vivants»
Le gnou ajouta : «Peut-on connaître votre sentiment»
Le taureau continua : «Nous finirons bien par les avoir dût-on y passer jusqu'au dernier».
Le gnou objecta : «Avec du temps on vient à bout de tout mais en l'occurrence c'est une autre paire de manches semble-t-il»
Le taureau voulut bien concéder :«Pour un que nous envoyons dans l'au-delà c'est vrai trop d'entre nous se retrouvent plus mort que vif»
Les animaux domestiques triomphèrent : «C'est bien ce que nous disions il est temps de changer votre fusil d'épaule»
Le gnou précisa alors:«D'autant que ce sont eux qui ont le fusil à l'épaule et qui tirent».
Les animaux sauvages de pester :«Des nèfles»
Le taureau de s'écrier sibyllin :«Oranges de Chine comme on dit en Andalousie»
Les animaux domestiques : «Nous n'insistons plus nous quittons l'arène»
Les animaux sauvages :«C'est çà continuer à faire l'âne pour avoir du foin»
Les animaux domestiques :«Et vous à marcher à quatre pattes sans voir plus loin que le bout de votre mufle»
Le gnou :«Messieurs il faut raison garder»
Les animaux sauvages :«De quoi je me mêle le gnou on ne t'a pas demandé l'heure qu'il est»
Le gnou : «Il est minuit moins une».
Le lion : «Tu ne perds rien pour attendre pusillanime animal»
Le gnou : «Tant mieux j'ai tout mon temps»
Le lion : «On fait le bel esprit mais rappelle-toi où force règne raison s'efface»
Le gnou : «Permettez-moi de m'éclipser sans tambour ni trompette sire lion j'ai de l'eau à porter à la mer»
Le lion : «Tu ne perds rien pour attendre je te ferai passer un sale quart d'heure»
Le gnou : «Gnou averti gnou à bride abattue»
les animaux domestiques : «Raccrochez vos gants revenons à nos moutons»
Le loup s'écria: «Des moutons où donc»
Les animaux domestiques : «Pas ici une fois n'est pas coutume»
Le loup : «Je n'entends pas»
«C'est vrai que ventre affamé n'a pas d'oreilles sire loup», remarqua le chat
Qui se décidant à intervenir avec toute la sagesse de sa gente
Habituée aux abîmes du paradoxe
Se tourna vers l'assistance et tint ces sages propos :
«Quant à vous amis faites comme nous dressez les hommes»
(Murmures d'approbation dans la foule, peut-on lire dans le compte rendu de la séance)
«Rien de plus facile vivez à leurs dépens en n'essayant point de prendre la lune avec les dents»
( nouveaux murmures d'approbation)
«Vous pouvez et garder votre liberté et bénéficier d'une vie confortable»
En bon orateur notre sage félin marqua un temps
«Pour ce faire rabrouez-les plus souvent que de coutume»
( exclamation d'approbation diverses notées par le greffier dans son compte rendu)
«Ne supportez qu'avec parcimonie leurs caresses»
«Ne leur obéissez pas en affichant une grande bonne volonté feinte»
«Donnez leur l'impression qu'ils ne savent pas se faire comprendre»
«En les regardant avec l'innocence la plus énigmatique possible»
« Afin qu'ils sachent que vous êtes des plus patients avec eux»
«Qu'ils pourront faire mieux la fois prochaine»
«Vous verrez prédiction de félin ils vous en seront reconnaissants»
( Acclamation de plusieurs minutes est-il noté dans le compte rendu officiel de la séance qui sert de base à notre propre récit)
Certains des animaux présents avaient pris des notes
Quelques uns demandèrent des précisions que le chat voulut bien donner
S'attirant des hochements de tête approbateurs
Certains se montrèrent sceptiques n'en pensant pas moins
Par exemple les bonobos ou les orangs-outangs et parmi eux Serge Pongtong
Dont nous connaissons tous les discours à votre disposition en suivant le lien ci-contre :
En est-il sorti un quelconque changement en bien comme dans le cas de la première conférence de Valladolid dont la conséquence fut la généralisation de la traite des noirs?
Pour en juger vous pouvez par exemple lire les rapports sur l'abattage des animaux domestiques notamment l'abattage rituel :
Et surtout surtout voir le film «Green» sur l'agonie d'une orang-outang en Indonésie :